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D'où naît l'attrait pour la Chine et pour l'Orient ? Peut-être, tout jeune encore, entre tablettes sumériennnes et hiéroglyphes, de la découverte de cette écriture et de cette langue, si insolites. Un instant vous vous rêvez Champollion ou Ventries, et déj? vous voil? aux confins de l'Occident, vous êtes en route... Le bouddhisme Chan ensuite, je crois, une religion qui semblait raisonnable de n'en être pas une et qui révélait quelque chose de l'esprit chinois, sur la route entre Mahayana et Zen, entre Inde et Japon. De l'acupuncture aux arts martiaux, les Chinois semblaient avoir percé la surface des choses, obéir ? d'autres règles, être allés plus loin. Shangri-la, Bruce Lee, de vieux numéros du National Geographic. Des récits de voyage : Alexandre, la légion perdue de Crassus, Marco Polo et la route de la soie, la Grande muraille, les canaux ? grandeur d'un continent, Macartney - incrédulité devant la guerre de l'opium et le sac du Palais d'été -, l'Orient Express, Shanghaï et sa légende. Les quartiers chinois des grandes villes, ces gens secs et nerveux, toujours si affairés, ces légumes et ces fruits qu'on ne sait nommer, les restaurants bruyants où l'on se trouve assis ? une table ronde, au milieu d'étrangers. Et encore, d'autres images : Hongkong et ses villages flottants, les jonques, les couleurs, les lampes, les robes traditionnelles des femmes en Chine et au Vietnam. Souvenir de nouvelles - étaient-elles de Paul Morand, de Pierre Loti, de je ne sais qui encore ? -, un quai, un train, la nuit, dans les volutes de vapeur une femme, une révolutionnaire, Chinoise bien sûr, très belle et très intense. Quoi de plus séduisant que ces yeux effilés, cette mince silhouette, cette grâce et cette fierté ? qui sont étrangères soumission comme arrogance ? Le visage de Gong Li, dans les premiers films de Zhang Yimou. Car bien sûr, comme dit Aragon, " J'aimais déj? les étrangères quand j'étais un petit enfant ". La révolution même, gorgée d'excès - qu'allait-il en sortir ? En attendant de savoir, la Chine était fermée, et l'inaccessible lui aussi attire.
En attendant ? En attendant, l'école est si ennuyeuse, l'esprit s'évade, la volonté s'émousse. Vous ouvrez l'oeil parfois, mais vous avez perdu le fil : insensiblement tout glisse, de rosa rosa rosam ? d'impossibles dissections du langage, de Villon ? des structures absentes, du triangle rectangle aux récurrences impénétrables. Les années passent. Un jour, surprise, c'est vous qui faites la classe. Temps de partir. Vous cherchez l'intemporel dans les rues de Pompéi, l'exotisme dans les souks de Fez et quelque chose de médiéval ? Coimbra. Oui, mais l'Orient ? A Coimbra justement, une veille de Noël ? chercher un bollo rei pour une belle, un autobus attire votre oeil, c'est la ligne Formosa, au départ. Il pleut ? Paris et Amsterdam est gris, mais ? Bangkok déj? il fait soleil. Un autre jour vous êtes ? Hongkong et, dans l'avion qui décolle, vous voil? seul Occidental. Une aérogare au milieu d'un champ. Vous attendez des soldats partout, des regards sans aménité, une fouille en règle. Rien de tout ça. Passeport, tampon, petit salut informel, la Chine s'ouvre ? vous ! Quasi trop facile.
C'était il y a quelque temps déj?. Reste ? apprendre la langue, ? vous faire des amis. De l? ? la télé, bien sûr, subsiste un vide, mais c'est ainsi. Dans toute histoire il y a des trous, pas vrai ? C'est la part du rêve.
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