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Shen Dali: «L´Influence de la Chine sur la culture française» cctv.com 05-07-08 17:55 |
(II) Quel était l'attrait de la pensée chinoise au Siècle des Lumières? Que peut-elle apporter à la pensée contemporaine? Quelles sont les différences fondamentales entre les cultures française et chinoise? Voilà des questions abordées dans le deuxième volet de ce texte. VOLTAIRE « La Description » du Père du Halde sur la Chine a exercé une influence marquante sur les écrivains français du XVIIIe siècle, notamment Voltaire qui a écrit «L'Orphelin de la Chine», un drame inspiré d'un recueil d'opéra traditionnel compilé sous la dynastie des Yuan (1279-1368). Il s'agit de la tragédie « L'Orphelin de la famille Zhao » seule oeuvre du dramaturge Ji Junxiang passée à la postérité. La légende de l'orphelin de la famille Zhao remonte aux « Mémoires historiques » de Sima Qian, traduits par le célèbre sinologue français Édouard Chavannes (1865-1918). Voltaire y trouvait les éléments d'une tragédie classique, ceux d'un bel opéra et des valeurs qu'il pouvait proposer à ses compatriotes. Voltaire pensait que l'orphelin de la famille Zhao qui représentait, à son avis, l'ensemble de la culture chinoise, pourrait apporter en France quelque chose de neuf. Il voulait donc exalter les Chinois et faire connaître leurs moeurs. Dans une lettre à son ami d'Argental, il disait qu'il aurait dû prendre la morale des Chinois. Donc, si cette pièce a touché Voltaire, c'est que celle-ci lui permettait de critiquer une certaine vanité de la civilisation française, comme le danger de la métaphysique. « L'Orphelin de la famille Tchao » est un monument qui sert plus à faire connaître l'esprit de la Chine que toutes les relations qu'on a faites et qu'on fera jamais avec ce vaste empire, a affirmé Voltaire. À ce sujet, Georges Brandes a mis l'accent sur « l'attention que Voltaire portait à la civilisation pacifique d'une Chine très ancienne, païenne, mais aux m?urs pures; ensuite, la glorification des vertus strictement humanistes: la fidélité, l'esprit de sacrifice et l'attachement indéfectible à un idéal strictement humain. Pour finir, l'Orphelin est l'expression évidente d'une philosophie de la vie qui serait en opposition marquée avec l'esprit satirique de « Candide». En introduisant « L'Orphelin de la famille Zhao » dans le champ des humanités françaises, Voltaire a mis en valeur la précellence de Confucius et sa morale, qui ne manquerait pas, espérait-il, d'inspirer aux Français l'amour de la vertu et l'horreur du vice. Sous la plume de Voltaire, Gengis Khan oppose en sa seule personne le tyran au bon roi, puisqu'il dit à Zamti, personnage principal de « L'Orphelin de la Chine » et mari de la belle Idamé : " Je fus un conquérant, vous m'avez fait un roi." La pièce de Voltaire a été montée à Paris le 20 août 1755. OEUVRES CHINOISES EN FRANCAIS Déjà au XVIe siècle, Montaigne avait introduit la Chine dans la littérature française. Après lui, les jésuites ont accordé une grande importance à la traduction des textes classiques chinois. Parmi les premières oeuvres littéraires présentées en France, citons d'abord Yu Jiao Li et Hao Qiu Zhuan. Le premier est un roman en vingt chapitres, écrit par Zhang Yun sous la dynastie des Qing, qui raconte l'histoire d'amour du lettré Su Youbai avec deux merveilleuses beautés, Bai Hongyu et Lu Mengli. Arcade Hoange (Huang Jialü né en 1679), premier Chinois converti envoyé à Paris par la mission jésuite française pour servir d'interprète à la Bibliothèque du roi, a commencé à le traduire en français. Mort en 1716, il a laissé sa traduction inachevée. C'est le sinologue français Abel Rémusat (1788-1832) qui a assuré la relève. Ainsi Goethe, grand amateur de littérature chinoise, a-t-il pu apprécier Yu Jiao Li, en version française, sous le titre suivant: L'Histoire de Hong Yu. Que pouvaient lire les Français dans ce roman qui flattât leur imagination? Raison, honneur féodal, fidélité conjugale, respect des songes prémonitoires, peinture des m?urs exotiques, tout ce qui manquait dans leur vie sociale. En effet, le choix du titre de la version française du roman est bien significatif. Hong Yu est le prénom qu'un vieux mandarin a donné à sa fille, et qui signifie «rubis». À la veille de la naissance de celle-ci, le futur père avait vu en songe un esprit lui donner un rubis éclatant comme le soleil. D'où Hong Yu qui incarne et la grande beauté et la brillante intelligence d'une jeune fille parfaite. Peut-être ce symbole est-il devenu plus que d'autres l'idéal féminin pour les lecteurs français sinophiles, tout comme Idamé dans L'Orphelin de la Chine pour Voltaire. Abel Rémusat a traduit en outre Le vieillard obtient un fils, drame chinois de la dynastie des Yuan. Un autre roman chinois traduit en français à la même époque est « Hao Qiu Zhuan » de Mingqiao Zhongren, connu plus communément sous le nom d'Amours courtoises, qui a paru au début de la dynastie des Qing. Par l'expression d'une vive hostilité à la loi du plus fort, ce roman a eu d'importants retentissements non seulement en France, mais aussi en Allemagne et en Angleterre. Il ne faut pas oublier l'orientaliste Stanislas Julien (1799-1873) qui a traduit, après le P. de Prémare, des passages en vers de « L'Orphelin de la famille Zhao », Mencius et Yu Jiao Li, seconde version du roman connu sous le titre Les vieilles cousines. Le Père du Halde a su donner sur les travaux de ses confrères la plus riche image de la culture chinoise en France. Puis, grâce à Abel Rémusat, on a publié, dans une traduction du P. Dentrecolles (1723), revue par Stanislas Julien, des extraits du « Jingu Qiguan » (Les Contes extraordinaires antiques et modernes). Les traductions d'oeuvres de la littérature populaire chinoise montrent que les jésuites se sont efforcés également de diffuser en France des thèses taoïstes, favorisant le courant philosophique du XVIIIe siècle français. DIFFUSION DE LA PENSEE TAOISTE La conception taoïste de l'Univers a été révélée aux Français par le « Tao Tö King », c'est-à-dire le « Livre du Tao et de la Vertu », dans la traduction de Stanislas Julien. Ce classique chinois en cinq mille caractères, dû à Lao Zi, est à l'origine du taoïsme qui prône le retrait de la société afin d'atteindre le Tao. L'ouvrage a eu, pendant des siècles, diverses versions françaises. Édité aussi en livre de poche, il est devenu de nos jours une sorte de bible pour tous ceux qui aspirent à une certaine vie spirituelle. Selon les taoïstes chinois, tout l'Univers est en mouvement continu de flux et de reflux, d'où une vie sans créateur. Aujourd'hui, cette théorie permet aux Occidentaux de reconsidérer leur thèse chrétienne sur le Big Bang dans le sens de l'idée de « mouvement créatif continu ». Par la vertu des versions françaises du « Tao Tö King », du « Yi King »(le Canon des mutations) et des ouvrages des sinologues français sur les philosophies taoïstes, la pensée taoïste agit surtout dans le domaine artistique. En voici un exemple. Un jour, le sculpteur Aristide Maillol (1861-1944) s'est écrié : "Ah! la philosophie chinoise est délicieuse. Il y a une phrase de Lao-Tseu qui m'enchantait déjà quand j'étais jeune : De terre se font les pots. Mais c'est l'inexistant dans le pot qui fait sa qualité de pot. C'est admirable, ça. Ça me ravissait. C'était l'époque où je commençais à avoir des idées, n'est-ce pas. Je comprenais ça tout à fait. C'était ce que je voulais faire... Je ne me suis jamais contenté de la forme, ni de la matière. Ce n'était pas la forme que je voulais faire, je voulais y mettre une âme. C'était l'esprit que je voulais, ce qui ne se voit pas. C'est l'inexistant dans le pot qui fait sa qualité de pot." Il semble que Maillol ait réalisé le Tao, puisqu'il a saisi le vide au sens taoïste du terme, dans la philosophie contradictoire de Lao Zi. |
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